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samedi, 27 juillet 2013 13:24

José-Marie Bel

José-Marie Bel

De passion et d’eau fraîche


Ecrivain-voyageur et conférencier, José-Marie Bel compte parmi les plus éminents spécialistes de l'architecture et du patrimoine yéménites. Il dirige à Paris, l'Espace Reine de Saba, centre culturel dédié au sud de la péninsule Arabique et à la Corne de l'Afrique. Portrait d'un humaniste, contemplatif et altruiste qui aime faire pétiller la vie.




Habité par le voyage depuis l'enfance, José-Marie Bel place la « rencontre » et le « partage » au coeur de son existence. Il fait partie de ces hommes exceptionnels pour qui l'altruisme n'est pas un vain mot mais un concept de vie. Dès l'âge de deux ans, s'engage une vie de nomade et à travers ses innombrables voyages, un apprentissage de la vie. Il grandit dans la région d'Ifni, au sud du Maroc, découvre le Sahara et s'imprègne de tout ce que le Maghreb peut lui offrir : la mer, le sable, la montagne, la végétation, un climat particulier, parfois rude, et son architecture traditionnelle. Ses parents se séparent alors qu'il n'a que cinq ans. En l'absence d'une figure paternelle, José-Marie Bel apprend très tôt à se débrouiller par lui-même. Balloté d'un pays à l'autre, s'adapter à de nouveaux milieux de vie constitue une nécessité dont il puise une grande force. « Dormir n'importe où, ou encore, manger presque n'importe quoi, font partie des choses qui me paraissent depuis longtemps tout à fait naturelles et restent néanmoins pour le moins invraisemblables pour la majorité des gens. »

A l'adolescence, il est confronté aux brimades de ses camarades. En France, on le traite de « sale pied noir » ; en Guadeloupe, de « sale blanc ». Sa réaction est d'une grande clairvoyance : « Face à ces humiliations, j'aurais pu choisir de m'isoler ; bien au contraire, j'ai préféré ouvrir mon esprit en allant au contact de ces peuples, en m'intéressant à eux, ainsi qu'à leur histoire. » Il reçoit une éducation catholique et évolue dans le même temps dans un environnement pluriculturel où se côtoient chrétiens, musulmans et juifs. Riche de cette diversité culturelle, cet humaniste accompli se définit comme profondément agnostique, un mode de pensée plus « raisonnable » : « je ne pouvais admettre que telle religion était meilleure qu'une autre. » Toutes ces expériences ont forgé son esprit et participé à sa propre construction.

Un homme épris de liberté et de curiosité

Animée d'une grande curiosité, sa mère lui communique sa soif de connaissance et son appétit pour la lecture. Elle l'initie aux conférences, au cours desquelles il rencontre nombre d'explorateurs, tels Jacques Chegaray, fondateur du Club des conférenciers de Connaissance du Monde et Thor Heyerdahl, anthropologue, archéologue et illustre navigateur norvégien qui rallia les îles polynésiennes à bord du Kon Tiki en 1947. José-Marie Bel nourrit dès lors une passion pour les bateaux traditionnels : pirogues en papyrus du Nil ou du lac Tana, le plus grand d'Ethiopie, les embarcations faites de roseaux du lac Titicaca ou encore les boutres, ces voiliers arabes originaires de la Mer Rouge. On lui doit notamment le projet « Yémen-Brest 2000 », lequel a obtenu le label « initiative 2000 » de la Mission pour la célébration de l'an 2000. Les récits de Marco Polo, parcourant la route de la soie, de Joseph Kessel, grand reporter et aventurier français, ou d'Albert Schweitzer, théologien alsacien connu pour son « respect de la vie », nourrissent également son désir insatiable de voyage.

A l'âge de 23 ans, il entreprend avec une amie un long périple initiatique, depuis l'Egypte jusqu'en Tanzanie : « Nous sommes passés par le Soudan, nous confrontant aux chaleurs extrêmes de la Nubie, par l'Erythrée, alors que la guerre avec l'Ethiopie sévissait, par le Yémen, un grand but pour moi. Vint ensuite la traversée de la Mer Rouge en boutre, témoins d'histoires inouïes. De là, Djibouti, au Kenya, l'Ethiopie et la Tanzanie. » Il parcourt ensuite en solo toutes les Antilles, vaste archipel qui s'étend de Cuba au large du Venezuela. Il explore aussi à quatre reprises l'Amérique du Sud. Adepte du voyage en stop, il en a testé toutes les variantes, cargo-stop, avion-stop, ou train-stop via des frets de marchandises repartant à vide après livraison, plus insolite encore, de la pirogue-stop. Ce moyen de transport vieux comme le monde exige patience et renoncement au confort mais lui garantit a contrario de fructueuses rencontres à faibles coût. Aujourd'hui encore, sa façon de voyager demeure « sauvage » et « rustique ». Non sans une certaine nostalgie, ce globe-trotter dans l'âme, évoque à quel point notre conception du voyage a évolué avec l'arrivée d'Internet – il a notamment créé un des premiers sites sur le Yémen et l'Ethiopie - la téléphonie mobile, les réseaux sociaux, sans oublier les ouvrages comme le Guide du routard, auquel il a d'ailleurs collaboré : « La part donnée à l'aventure et à l'exploration devient assez limitée. »

Une philosophie du voyage

Pour lui, « le voyage ne symbolise pas l'amusement, mais une quête, une profession de foi qui nécessitent un engagement ininterrompu ; c'est se confronter aux autres et à soi-même. » C'est aussi entretenir un corps sain dans un esprit sain car ainsi qu'il se plaît à le souligner « qui ménage sa monture va loin ! » : « Grand amateur de marche à pied, je bouge beaucoup, je bois peu d'alcool et je fais attention à mon hygiène de vie. »

L'exploration de nouveaux horizons, c'est aussi prendre le risque de « s'exposer » : « Lors de mes expéditions, je suis passé par des écueils et des étapes très périlleuses, tentatives de kidnapping, fusillades ou animaux sauvages. Toutes ces expériences m'ont permis de réfléchir au sens de la vie ! » Ce philosophe voyageur se nourrit des modes de vie et des rencontres, ici ou ailleurs, pour nous les restituer sous forme de livres, de cahiers de notes et de dessins, de conférences, d'expositions ou de voyages accompagnés.

Dans les années 70, des émeutes secouent la Guadeloupe. Un courant de réflexion sur la négritude et la race s'engage avec à sa tête Aimé Césaire. José-Marie Bel se résout à poursuivre ses études universitaires en France, dans les domaines des Arts plastiques, de l'architecture et de l'ethno-anthropologie. A l'époque de Solidarność, une bourse de recherche lui permet d'assouvir sa passion pour le dessin, à Varsovie, en Pologne. On la retrouve au coeur de ses voyages : « Dessiner est pour moi aussi vital que respirer. Dans ma philosophie du voyage, mes dessins me permettent de vivre intensément mon aventure. Ils participent également à mon désir personnel de faire quelque chose de ma vie, tout en laissant une trace. » En 1983, il achève par ailleurs sa thèse de doctorat sur l'esthétisme et l'architecture du Yémen. Cet amoureux de la nature, s'initie aussi à la botanique qu'il étudie en autodidacte depuis une vingtaine d'années.

L'oeuvre d'une vie.

Ses travaux sur la Corne de l'Afrique président à sa rencontre avec Théodore Monod, éminent scientifique naturaliste, explorateur et humaniste français. Ensemble, ils poursuivent un travail de recherche au Yémen, entamé en 1977, sur les encensiers et les routes caravanières de l'époque antique. Ils fondent Arabia Félix, le comité français de soutien aux actions de l'UNESCO au Yémen. Cet homme érudit lui évoque son grand-père peu connu, Pierre Bel, un historien, journaliste, dessinateur et conférencier, lequel a collaboré avec Jean-Yves Cousteau dans les années 30 et 40 lors de fouilles sous-marines en Méditerranée. Architecte-restaurateur à cette même époque, José-Marie Bel remporte un concours international, au terme duquel la France lui confie la restauration d'une des maisons d'Arthur Rimbaud, à Aden. Une aventure qui se soldera par la fermeture de ce site culturel, en prise avec une guerre civile entre l'ex-Yémen du Sud et l'ex-Yémen du Nord. De 1995 à 2000, il préside également l'association Les amis de Rimbaud.

Epris de liberté, ce philanthrope s'est toujours détourné de l'idée de faire carrière car pour lui: « L'essentiel réside dans le présent ; c'est aussi pour cela que la question de la retraite ne fait pas partie de [ses] préoccupations.» Indépendant, bénévole et sans aucune subvention, il a fait maints sacrifices pour permettre à son centre culturel, l'Espace Reine de Saba, de perdurer. C'était sans compter sur les attentats du 11 septembre 2001, la guerre en Afghanistan et celle en Irak, lesquels ont considérablement modifié le rapport que le public entretient avec le monde arabe. En proie à des difficultés financières et à un problème de communication, ce rêveur lucide sent poindre à l'horizon l'heure du bilan, « au point qu'il n'exclut pas d'ici quelques années de passer à autre chose.» 
Notre capitale perdra alors l'un de ses plus beaux lieux de création et d'exposition, un site au sein duquel José-Marie Bel se plait « à faire pétiller la vie et la rendre plus gaie ! »

Par Krystel Le Naour
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