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jeudi, 19 mai 2016 10:46

Le Malecón sofa de La Havane

Le Malecón sofa de La Havane Nadine Pinon
Le front de mer de La Havane, le Malecón, est le rendez-vous favori et incontournable des Cubains...

Notre rêve devient réalité à l’aéroport de La Havane. Dehors, une vieille voiture américaine bleu ciel des années cinquante, véritable trésor national et relique d’un passé faste, nous attend. Elle rutile. Nous devons fermer les portières doucement, par respect.
Le moteur, un Toyota, vrombit ; nous voilà embarqués pour une balade de 30 km qui nous mènera à notre casa particular. Nous logeons dans le quartier populaire de Centro Habana.
Nous sommes frappés par l’atmosphère légère, chaleureuse, gaie, nonchalante qui règne dans notre quartier aux maisons et aux rues délabrées.

Les Havanais donnent le ton.

Luminosité, ciel plombé et vagues Nous sommes ensuite surpris par le peu de circulation, l’absence de boutiques ; quelques marchands de quatre saisons arpentent les rues, pas d’enseignes publicitaires. Malgré cela, il y a la vie, du rythme, de la couleur : nous sommes vite happés et fascinés. Nous arrivons devant El Malecón de La Habana, lieu mythique, lieu chanté, poétisé, peint, photographié, dansé...lieu de fête, de rêverie. Le temps est maussade, il bruine et la luminosité de ce ciel plombé est exceptionnelle, les vagues se brisent contre la digue, envahissant la promenade. Le spectacle est incroyable. C’est le côté mer. Côté terre, se déploie sur 8 km une avenue bordée, au début, de maisons bourgeoises aux couleurs pastel délavées, plus loin d’immeubles hauts des années cinquante-soixante. C’est beau, mais nous sommes attristés. Ce pays est comme endormi, arrêté. Depuis la révolution cubaine, rien ou plutôt si, un abandon aux embruns et à la surpopulation de ces magnifiques maisons bourgeoises du XVIIIe et XIXe siècles, patrimoine architectural éclectique inestimable. Mais le tourisme apporte sa note positive, la restauration de ces merveilles est enclenchée.
Nous nous sentons coincés sur un trottoir chaotique, entre la mer et une autoroute urbaine à deux ou trois voies. Si ce n’est quelques voitures et des cocos, taxi-moto locaux en forme de demi-oeuf, la circulation est plutôt fluide. La récompense est au bout du Malecón : un daïquiri à l’hôtel Nacional, lieu mythique des années 1930.

Ambiance joviale

Mais le Malecón c’est avant tout encore l’ambiance joviale. De jour comme de nuit, des groupes d’amis se réunissent pour discuter, boire du rhum ou fumer un cigare, des pêcheurs rêveurs passent le temps en trempant le fil de leur canne à pêche, des musiciens jouent de la salsa, des couples main dans la main échafaudent quelques projets de vie, des enfants jouent, sautent, plongent dans la mer...
Le Malecón, c’est “le sofa de La Havane”. Que dire de l’instant magique, le coucher de soleil sur le Malecón, inoubliable, que je partage avec de chaleureux Havanais. Puis, nous nous perdons dans les ruelles de La Habana Vieja, plongés dans un passé architectural colonial exceptionnel. Habana Vieja n’est pas une ville musée. Le quartier vibre d’une vie sociale authentique, on y côtoie les joueurs de dominos installés à l’ombre, les enfants en uniforme sortant de l’école, les Havanais assis devant leur porte discutant avec leurs voisins, sans oublier la télévision fortissimo sortant par les fenêtres ou les portes toujours grandes ouvertes.
Ces trois jours passés à La Havane nous ont envoûtés. “Cuba es La Habana, y los demas es paisaje” (Cuba, c’est La Havane, le reste c’est du paysage).
La Havane, ville mythique et fascinante se déguste sans modération.

< Texte Chantal Martignon (91)
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