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Carnet de route

Qui connaît TUTURU ?


carte-vanuatu1abc Dans l'Océan Pacifique,à 550 km au nord est de la Nouvelle Calédonie se trouve l'Archipel volcanique mélanésien des Nouvelles Hébrides devenu indépendant en 1980 sous le nom de Vanuatu.

La république du Vanuatu est formée de 83 îles. D'août à novembre 2000, j'ai séjourné dix jours sur Efaté où se trouvent la capitale Port-Vila et l'aéroport international, puis deux semaines chez une famille Nivane sur Epi, ensuite une semaine sur le caboteur Kotu qui ravitaille les îles de Malakula et d'Ambrym en riz, sucre, ciment, pétrole...et en échange,revient avec la cale pleine de coprah et pour terminer 2 mois sur Espiritu Santo .

Une foule de souvenirs heureux, exceptionnels sont toujours présents dans mon cœur quand je songe à ce pays...

Aujourd'hui je vais vous parler de Tuturu !


C'est un petit village isolé situé à l'extrème nord d' Espiritu Santo qui est la plus grande île (4000km2)et la plus montagneuse . Une semaine de découvertes extraordinaires dans ce coin du bout du monde.

C'est à Luganville que je rencontre dans la cour de l'IUFM Nancy, jeune instit en congé de maternité descendue de son village pour régler des formalités administratives. Elle m'invite à repartir avec elle et bien sûr j'accepte.

Le voyage est une véritable expédition : un quatre-quatre surchargé klaxonne et s'arrête devant moi. Trois femmes sont installées dans la cabine. La benne déborde de sacs et de paniers. Nancy, 3 ados et 2 enfants sont assis dessus. Où vais je monter? Un jeune a déjà pris mon sac et un autre me tend la main. Nous sortons de la ville et slalomons sur une piste poussiéreuse et défoncée. Au début,on voit des bœufs broutant sous les cocotiers. Ensuite,des forêts de plus en plus denses défilent sous nos yeux.

Vanuatou1La piste de 60km semble un long serpent dans cette verdure qui cache le ciel. Une halte à mi chemin pour refroidir le moteur. Je suis sereine car le chauffeur est aussi mécanicien. Nous arrivons à la plage de Matantas. Les sacs sont déchargés sur le sable, on se repose ,on attend! Les enfants jouent. Je prends des photos de cette baie immense, de la plage,des arbres. On me prend pour un reporter télé.

Nous devons traverser Big Bay en bateau car c'est le seul moyen d'accéder au village inaccessible par la terre. Le signal est donné: les bagages sont entassés dans une barque à moteur. Nous nous installons pour parcourir 40km sur une mer infestée de requins. Tous les Nivannes sont calmes, je dois les imiter. A 300m du rivage le moteur a des ratées,notre sauveur mécanicien intervertit les 2 extrémités du tuyau et le moteur repart. Des dauphins nous accompagnent.

Il fait beau,la mer est belle,on échange des sourires car ils ne parlent que le Bichlamar. Seule Nancy parle Français. Petit arrêt dans deux villages côtiers pour y déposer des passagers. La barque nous dépose Nancy et moi sur la plage de Tuturu, terminus du voyage qui a duré une dizaine d'heures.

Des enfants font des dessins sur le sable. Nous traversons une petite cocoteraie et arrivons au village. William, le chef coutumier,vêtu d'un short nous accueille. Il ne connaît pas notre langue mais a créé une école de deux classes.

Sur la plage,la salle des petits tenue par Nancy est un simple enclos de bambou avec un toit en feuilles de cocotiers. Trois vieilles tables-bureaux pour les 7-8-9 ans,une table ronde basse pour les 6 enfants de 5-6 ans,un petit tableau et la table de la maîtresse où s'entassent quelques cahiers et livres sont le seul équipement de cette classe. Dans ces conditions,il y a peu d'écrits mais plutôt des exercices oraux toujours en français. A chaque cyclone, tout cela s'envole, disparaît, est détruit.

Il n'y a plus de dictionnaires. Je pose sur la table des petits une boite de crayons de couleur. Un enfant prend la boite, l'ouvre avec précaution,en retire un crayon,la referme et la repose sur la table.Tous les enfants feront ces gestes à tour de rôle. Aucune dispute. Ils ont devant eux un trésor!. La journée se termine par un chant et une prière.

Les grands ont plus de chance. Leur classe est neuve. James , le fils du chef William et l' époux de Nancy achève la construction de sa classe. Construite sur une petite hauteur, une base solide avec 4 rangées de parpaings, puis au dessus des tressages de feuilles de cocotiers et lataniers forment de jolis murs. Un grand tableau et des tables de classe en bon état pour 12 garçons et 3 filles. Une belle réussite pour le village qui souhaite faire une classe identique pour les petits.

Un peu plus loin, deux cases sont réservées aux internes (enfants des villages perdus dans les montagnes). Ils arrivent le lundi midi et repartent chez eux le vendredi midi. Pour la nourriture, ils apportent avec eux quelques provisions et cultivent aussi un petit jardin près du dortoir. James les aide, les surveille et dort la nuit avec eux. Ce qui fait que je suis logée dans sa case avec Nancy et leur bébé Max de 2 mois.

Un jardin d'enfants est tenu par une jeune fille de 16 ans (nièce de William)qui les amuse, les fait parler et chanter... Quelle surprise pour moi d'entendre ces bambins souriants, curieux,la morve au nez, chanter « chevaliers de la table ronde » .

Une seule épicerie où huile, sucre,riz ...sont partagés quelques heures après le passage du Kotu :barge du commerçant chinois de Luganville qui passe une ou deux fois par an pour ramasser le coprah.

Mon arrivée bouscule un peu la vie de la vingtaine de villageois. C'est moi la sauvage. Je m'adapte à leur façon de vivre, apprends beaucoup et retrouve des gestes de nos campagnes du temps de mon enfance. Les femmes et enfants n'ont jamais quitté Tuturu et n'ont jamais vu de Blancs. Les petits, dans les bras de leur mère, hurlent en me voyant. Les plus grands viennent derrière moi pour me toucher la peau du bras et s'enfuient dés que je me retourne. Le bichlamar (créole à base d'anglais)est leur langage.

Leurs sourires, leurs mimiques, leurs gestes ou tout simplement les regarder agir me font comprendre bien des choses quand Nancy et James ne sont pas près de moi pour traduire. Matin et soir je dois me laver dans la rivière, à l'endroit réservé aux femmes et bébés. Gardant leur robe missionnaire, elles sautent dans la piscine naturelle,se frottent avec des feuilles un peu veloutées. Les hommes et les enfants ont chacun leur coin un peu plus loin.

La nourriture est simple : poisson, tubercules d' igname et de taro ,noix de coco,sont la base alimentaire. Le four, un trou creusé dans le sol est garni de gros galets et de bois qu'on allume. Quand les pierres sont bien chaudes,on y dépose au centre le laplap et le tuluk ( bouillie à base de farine de manioc avec un peu de poisson ou de viande enveloppée dans une feuille de bananier).

On recouvre le tout avec des feuilles et on laisse rôtir une dizaine d'heures. La galette blanche est devenue dorée et quelques bouchées vous remplissent l'estomac. Les casseroles lavées sur la plage avec sable et feuilles brillent sur les étagères placées près du foyer toujours allumé. L'eau chaude pour les tisanes naturelles est toujours prête. La case ne sert qu'au repos, la vie s'ordonne autour de ce foyer en plein air.

La vie est proche de la nature. Les déplacements se font à pied. Les gros sacs de sable de la plage,de légumes et fruits des jardins,de bois de la forêt sont transportés par les deux chevaux jusqu'au village. Tôt le matin,la famille,munie de coupe-coupe et d'une barre à mine,monte vers les jardins éloignés sur les hauteurs. Une bonne heure de marche est nécessaire sur de petits sentiers où noix de coco, papayes, mangues,bananes, nagavikas... font notre bonheur pour le déjeuner.

Des feuilles de latanier sont tressées pour fabriquer les paniers qui servent le soir à ramener les légumes. Les racines de kava ne sont pas oubliées. Elles serviront à une cérémonie coutumière.

Lavées,hachées,mises à tremper dans un bac d'eau,elles donnent un liquide qu'il faut filtrer. Cette boisson est réservée aux hommes. Je connais les effets du kava car c'est mon 3ième essai. Ce soir,vivant au sein de la tribu depuis quelques jours, je dois honorer le chef coutumier en trinquant avec lui. Il me tend un shell (demi-noix de coco servant de bol) rempli de ce breuvage que je dois boire cul sec comme lui. J'avale ce kava mais un goût terreux,amer remplit ma gorge qui se paralyse.

J'ai du mal à remuer ma langue et mes mâchoires qui s'engourdissent, je parle doucement et à voix basse. Je suis zen .Cette soirée-veillée est agréable. On me donne un épi de maïs grillé. Le ciel est étoilée,la température est douce,je suis entourée d'amis très respectueux, je peux m'endormir à la belle étoile.

La mer est précieuse pour le village. Pêcher est un plaisir car le poisson est abondant et excellent. Conduire une pirogue est un jeu d'enfant et c'est le seul moyen de transport et d'échange avec les villages voisins.

Le chef coutumier règle tous les problèmes du village, propose les activités dues à ma présence : courses de chevaux et de pirogues(même les jeunes enfants participent) . Je dois planter deux noix de coco,aller travailler à la tarodière.

Beaucoup de chemin pour y arriver et grosse surprise : des petits terrains en terrasse où un filet d'eau coule du haut en bas. La terre est trempée, j'enfonce jusqu'au genou dans cette boue. Mes premiers pas sont très pénibles mais comme mes amis,je vais planter quelques tubercules et en arracher d'autres. Un panier en feuille se tresse en quelques minutes. Garni de ces précieuses patates,la lanière du sac posé sur ma tête, je les ramène et les offre à mon protecteur. Le soir,à la veillée, nous les mangeons.

Les indigènes sont fiers de se réunir sur la plage ou dans la salle commune pour me présenter leurs danses rythmées par des cris, et battements des mains et pieds. Les costumes sont simples avec feuillages et grelots de graines aux chevilles. Quelle joie pour eux de faire connaissance avec le camescope.

Le lever se fait avec le jour. Les soirées sont longues car on s'habitue à l'obscurité. On programme les activités du lendemain. On partage la nourriture,l'amitié, le bonheur tout simplement. Je dois quitter ce paradis où je laisse quelques traces et repars avec un précieux cadeau : une magnifique dent de cochon enroulée sur un tour et demi.

Comment pourrai-je oublié Tuturu,ce tout petit village et mes amis lointains mais si proches dans mon cœur...

Léa Amand (35)
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