You have no items in your shopping cart.

Vous êtes iciAccueil|La vie de l'association|Récits de voyage|Les lions du Pendjab
mardi, 10 décembre 2013 15:19

Les lions du Pendjab

Le climat est agréable au printemps dans la région du Pendjab, située au nord ouest de l'Inde. C'est la période choisie par la communauté Sikh pour célébrer leur dernier guru, Gobind Singh.

Le sikhisme est né au XVe siècle et est représenté comme la synthèse de l'hindouisme et de l'islam. Pendant deux siècles des gurus se sont succédés pour transmettre la bonne parole aux fidèles. Au XVIIe siècle, le 10ème et dernier guru Gobind Singh a marqué son époque par des faits d'armes et par la promulgation de préceptes pour conserver l'originalité du sikhisme:

Les cinq K : Le Kesh, les cheveux et les poils qui ne doivent, si possible, jamais être coupés. Le Kachcha, port d'un caleçon long, Le kara, un bracelet d'acier au poignet droit. Le Kangha, un peigne retenant les cheveux sous le turban. Le kirpan, un poignard ou une épée.

Cela différencie les Sikhs du reste de la population indienne. Parallèlement à l'apparence, il a été développé la pratique des arts martiaux, l'un des plus connus est le gatka qui repose sur la manipulation d'armes blanches dont l'efficacité dépend de la concentration mentale. Les  dix vertus qu'ils proposent sont les suivantes : La compassion, la charité, le pardon, la propreté, le contrôle de l'esprit,la vérité, la pureté,l'accomplissement spirituel, la témérité et la dévotion à leur dieu unique.

Depuis cette époque les Sikhs ont formé une communauté militante dont un des rôles est de se battre avec acharnement pour défendre leur foi.

Au début de chaque printemps a lieu un grand festival religieux, le Hola Mohalla à Anandpur Sahib située près des contreforts de l'Himalaya à l'est de Amritsar la capitale du Pendjab.

Le temple d'or, lieu sacré du sikhisme est situé à Amritsar. Rappelons qu'en 1984 Indira Gandhi alors premier ministre, déclancha une opération militaire pour déloger des indépendantistes Sikhs réfugiés dans le temple. Plus de quatre cents furent tués dont cent cinquante femmes et enfants. Quatre mois plus tard, Indira Gandhi est assassinée par ses gardes du corps qui étaient des Sikhs. Cela montre le côté extrémiste de ces derniers qui n'hésitent pas à sacrifier leur vie pour la cause commune.

Tassinarri 3C'est en consultant une revue, il y a quelques années, que j'ai découvert tout à fait par hasard l'existence du Hola Mohalla. L'originalité des costumes, la beauté des turbans et l'allure des personnages m'ont fasciné. Cette année j'ai réussi à combiner un voyage en Inde à la période du festival. Un guide, Sahota Rajpal, un chauffeur Singh Charanjit, une voiture et un hôtel situé à une soixantaine de kms ainsi que le matériel nécessaire pour tourner un film. Il n'en faut pas plus pour que je sois impatient d'être sur place.

Les renseignements sont difficiles à obtenir. J'ai l'impression que le festival ne se déroule pas en respectant une organisation et un programme biens définis. Afin de faire un repérage, je demande au chauffeur si l'on peut se rendre sur place la veille. Le guide Sahota participe à la fête pour la première fois et est tout à fait d'accord. Nous prenons la route le lendemain de notre arrivée vers huit heures. Après une circulation normale pendant la moitié du parcours, le trafic se densifie et finit par se bloquer. Impossible d'aller plus loin. La foule est énorme. Je prends conscience tout d'un coup de l'importance de la population de l'Inde. Les Sikhs sont les organisateurs du festival et en même temps les participants. Ils ne représentent que 2% de la population du pays mais ils sont néanmoins deux millions dont la moitié est attendue pour le festival.

Les cars sont bondés et leurs galeries aux bagages débordent de passagers. La route est recouverte d'une multitude de véhicules divers mais ce sont les tracteurs et leurs remorques qui ralentissent le trafic. Presque tous les cultivateurs du Pendjab sont présents, leur famille sur les remorques ainsi que le matériel nécessaire pour vivre et coucher pendant trois ou quatre jours. Devant l'impossibilité d'aller plus loin nous décidons de faire demi tour. Le repérage sera pour une autre année.

Méfiants, le  lendemain nous partons plus tôt et surprise nous arrivons au but assez facilement, la plupart des participants ont fait le voyage la veille en prévision des encombrements. Seul petit problème sur la route, un groupe de jeunes a barré la route avec des branches d'arbre. Ils arrêtent les voitures et demandent de l'argent pour je ne sais quelle cause plus ou moins avouable. A défaut de satisfaire leur demande ils aspergent copieusement les passagers de poudres de toutes les teintes. La fête des couleurs et du printemps le holi battait son plein il y a deux jours et c'est un bon moyen pour eux d'épuiser le stock de poudre non utilisé. Singh et Sahota parlementent, donnent une pièce et la voiture repart. Nous l'avons échappé belle.

Après avoir garé la voiture sur un des immenses parkings situés à deux km d' Anandpur Sahib, nous sommes au milieu d'une foule impressionnante dans la rue principale. Sahota se renseigne au fur et à mesure que nous avançons. Depuis un moment  je cherche à comprendre où vont les groupes qui parcourent la rue principale dans les deux sens. Deux rivières humaines qui se rencontrent formant des remous empêchant toute progression normale. Après avoir évalué les risques de tournage en raison de l'importance de la foule, j'ai laissé une partie de mon matériel de cinéma dans le coffre, notamment le pied. Je me contenterai de la crosse d'épaule comme stabilisateur. Erreur ! La crosse fait 50 cm de long alors que je ne dispose que un ou deux cm avec la personne qui me précède. Remarquant les efforts que je fais pour filmer un sikh me fait signe de le suivre et je me retrouve au balcon du premier étage de son immeuble au milieu d'une dizaine de personnes qui s'empressent de s'écarter pour me laisser de la place. Je vais être aidé plusieurs fois au cours de la journée par des Sikhs dont la surprenante prévenance contraste avec leur effrayante réputation et dont le regard semble transpercer l'âme de celui qu'ils regardent.


L'effervescence est à son comble. Des haut-parleurs, des tambours et des chants emplissent l'atmosphère d'un fond sonore qui ne laisse pas une seconde de répit. Un état de transe s'empare progressivement de la foule. La rue est parcourue par des hommes en armes dont certains n'attendent pas d'être arrivés sur un emplacement approprié pour engager le combat. Ils s'affrontent au sabre avec des gestes assez précis pour frôler la peau de l'adversaire sans le blesser. La plupart sont des Nihangs, reconnaissables à leur costume bleu et à leur turban orange.

Tassinarri2Ce sont les Moines guerriers appelés aussi les Lions du pendjab. Malgré que le sikhisme soit basé sur la tolérance vis-à-vis de tous il y a un précepte qui dit : Lorsque tous les autres recours ont été épuisés, alors il est parfaitement normal de tirer l'épée.

Un peu plus tard je quitte le balcon pour être propulsé dans un enclos où se déroulent des combats et des exhibitions d'armes insolites tel que le Chaakara, un tourniquet tissé qui exige un maniement particulier et une adresse peu commune. Il était utilisé pour tromper l'ennemi mais aussi pour être jeté sur son corps afin de bloquer ses mouvements comme une toile d'araignée immobilise sa proie. D'autres combattants utilisent des fouets en cuir longs de plusieurs mètres ayant une lame coupante à leur extrémité. Il ne se passe pas un Hola Mohalla sans qu'il y ait des blessés

Abrités dans des endroits plus calmes, des Baba, c'est ainsi que l'on dénomme les Nihangs âgés et considérés comme des sages, exhibent des turbans impressionnants dont les plus volumineux ont nécessité plus de 400 mètres de ruban et pèsent jusqu'à 35 kg. Ils sont entourés par des plus jeunes qui souhaitent les toucher et recevoir leur bénédiction.

Il suffit de se joindre à un groupe de Nihangs pour être emporté par la ferveur collective. Alors l'individu se noie et disparaît pour ne faire qu'un avec l'âme des Sikhs.

Dans un bâtiment, un peu à l'écart, des volontaires préparent dans une immense cuisine les repas qui seront offerts aux participants. Les installations permettent de faire entre 5000 et 10000 repas qui seront servis de jour comme de nuit.

En fin d'après midi une grande partie de la foule se déplace vers un terrain immense, sorte  de champ de courses où des groupes de cavaliers créent l'évènement. Je me précipite à l'endroit du départ en prenant garde de laisser un peu de distance avec les chevaux et leurs cavaliers. Certains montent deux chevaux en même temps, un pied sur chacun et la longe entre les dents.

Texte et photos :
< Robert Tassinari
Lu 3089 fois

Derniers adhérents en ligne

cpruvel   ccestia   gdbordage   geragouin   cavernon   becanler   opaugam   adhabm   parousset   jpdevey   mduchesne   dstoecklin   frderenne   anpoisson   blecerf  
Copyright © 2024 Aventure du Bout du Monde - Tous droits réservés
Joomla! est un Logiciel Libre diffusé sous licence GNU General Public